Contre toute attente et sous l’impulsion de certains le disque vinyle est de retour.
Parmi ceux qui en font la promotion on retrouve dans le désordre:
- Les audiophiles de la première heure qui ont toujours fait tourner les galettes noires sans jamais donner de crédit à l’audionumérique. Ils ont une collection de disques, une platine bien réglée, et le savoir-faire pour se servir de tout cela, acquis après des années de pratique.
- Des sites marchands pour lesquels ce revival est bien dans l’air du temps, celui du vintage, de l’artisanat d’art, du luxe fragile. C’est beau une platine, un disque noir brillant très chic, dans lequel vient glisser un diamant avec une cellule fabriquée en petite série, numérotée, faite d’un corps en bois exotique. Plus tout une flopée d’accessoires, disques tests, réglage de cellule, pèse cellule, préampli phono, pochettes et T-shirt "vinyl lives".
- Des journalistes dont l’attachement au vinyle marque le début de leur carrière, et fleure bon les années 60-70. Sans avoir jamais fait de prosélytisme du vinyle car il a bien fallu traverser les années 1985 à 2005, années du CD et faire vivre les journaux, ce retour aux sources à l’allure d’une résurrection. Ils ont à la fois une vrai affection pour ce support et peuvent vendre leurs connaissances à un public néophyte.
- Des audiophiles inexpérimentés qui pensent que le vinyle est le remède à tous leurs maux et qui devraient commencer par optimiser leur système avant de changer de source. Ceux là risquent de retrouver le doux son du disque 45 tours qu’ils ont connu avec leur mange disque. Contrairement au CD qu’un enfant de trois ans saurait faire marcher, le vinyle est une affaire compliquée où l’expérience ne s’achète pas. La performance est autant affaire de temps passé aux réglages que de somme investie dans le matériel. Les paramètres entrant en compte dans la bonne reproduction sont la température de la pièce, le temps sec ou humide, la vitesse avec laquelle vous avez posé la cellule dans le premier sillon, la capacitance de votre câble, l’épaisseur et la matière de votre couvre plateau etc. Paramètres dont la lecture audionumérique se fiche bien.
La question de la qualité ne se pose pas et le vinyle possède, quand il est très bien lu, ce "plus" que le CD n’a pas. Cette expérience je l’ai fait mainte fois, son contraire aussi. Les dernières démonstrations de salons faisant appel au disque noir étaient pitoyables. Les rares démonstrations favorables je les ai eu chez des audiophiles expérimentés. A cette époque je n’ai pas franchi le pas, pourquoi se lancer maintenant ? Mon système m’apporte de grandes satisfactions et je ne possède aucun vinyle.
La vrai question est celle-ci: "faut-il investir aujourd’hui dans la lecture analogique de disque vinyle" ?
Si votre grand père vous a légué sa collection de disque des années 50 et 60, foncez. Si vous ne possédez aucun disque, ou juste les 20 disques qui passaient en boucle dans votre chambre d’étudiant la question mérite d’y réfléchir un peu:
Tout d’abord pourquoi vouloir du vinyle maintenant ? après tout cela existe depuis plus de 50 ans, pourquoi ne vous y êtes vous pas intéressé il y a 10 ans ? même 5 ans ? vous auriez sûrement à cette époque racheté une collection pour une bouchée de pain. Mais maintenant il va falloir payer le prix fort.
Ou trouver des disques ? d’occasion chez des revendeurs spécialisés, dans les foires, sur ebay ? dans quel état de conservation et d’usure, à quel prix ? neuf? Quels disques ? de collection, pressage des années 50/60/70 ? des pressages plus récents, de labels audiophiles, des rééditions ? Mastering analogique ou mastering digital avec conversion N/A avant transfert sur la matrice de gravure ?
La qualité du vinyle est limitée par la qualité du master de gravure comme pour les supports numériques. Et vous le savez les différences sont grandes. Cette angoisse du mastering concerne moins les disques anciens que les disques produits à partir de la fin des années 70. On trouve bien des éditions limitées en 45 tours mais elles sont rares. L’investissement nécessaire à la bonne lecture des disques est-il justifié pour une production aussi faible ?
A part quelques rares labels, les usines de pressage ont fermé et les disques neufs sortent en éditions limitées. Si ce mouvement n’est pas un simple revival la production de disque repartira et ce support sera disponible pour un public plus large. Si ce n’est pas le cas il risque d’y avoir des déçus.
Je fais l’avocat du diable bien sur, peut être c’est pour mieux me convaincre de résister.
Rien ne vous empêche de rêver comme je le fais. Ce rêve c’est croire qu’il est possible d’avoir plus de qualité sonore. Celui qui croit cela choisira sa voie, vinyle ou pas, et poursuivra son chemin. C’est ainsi que vit la passion de la haute fidélité.